L’impact des influenceurs dans l’univers marketing du jeu vidéo

L’industrie du jeu vidéo connaît une transformation majeure dans ses stratégies promotionnelles avec l’avènement des influenceurs. Ces créateurs de contenu, qu’ils soient streamers sur Twitch, YouTubers ou personnalités Instagram, ont redéfini la manière dont les jeux sont promus et perçus par le public. Leur authenticité et leur connexion directe avec les communautés de joueurs offrent aux éditeurs un canal marketing d’une efficacité sans précédent. Cette dynamique a bouleversé l’équilibre traditionnel entre médias spécialisés et communication officielle, propulsant les influenceurs au rang d’acteurs incontournables dans l’écosystème vidéoludique. Leur capacité à générer de l’engagement, à façonner l’opinion et à stimuler les ventes en fait désormais des partenaires stratégiques pour l’industrie tout entière.

L’évolution du marketing vidéoludique : de la presse spécialisée aux influenceurs

Le paysage promotionnel du jeu vidéo a subi une métamorphose profonde au fil des décennies. Dans les années 80-90, la promotion des jeux reposait principalement sur la presse écrite spécialisée. Les magazines comme Tilt, Joystick ou PC Jeux en France constituaient les sources d’information privilégiées des joueurs. Ces publications mensuelles dictaient les tendances et influençaient considérablement les décisions d’achat grâce à leurs tests et avant-premières. Les développeurs et éditeurs entretenaient des relations étroites avec ces médias, leur fournissant des versions préliminaires pour obtenir une couverture favorable.

L’arrivée d’internet au début des années 2000 a marqué un premier tournant, avec l’émergence de sites spécialisés comme Gamekult, JeuxVideo.com ou IGN. Ces plateformes ont accéléré le cycle d’information et démocratisé l’accès aux actualités vidéoludiques. Les forums associés à ces sites ont commencé à créer des communautés de joueurs, préfigurant l’aspect social qui caractérise aujourd’hui la consommation de contenu vidéoludique.

La véritable révolution est survenue avec l’avènement de YouTube vers 2010, puis de Twitch quelques années plus tard. Des créateurs de contenu comme PewDiePie, Markiplier ou Squeezie en France ont commencé à attirer des audiences massives avec leurs vidéos de gameplay commentées, leurs critiques et leurs réactions spontanées. Ces nouveaux médias ont introduit une dimension personnelle et émotionnelle dans la promotion des jeux, contrastant avec l’approche plus formelle des médias traditionnels.

La démocratisation des plateformes de streaming

L’explosion de Twitch à partir de 2014 (après son rachat par Amazon) a définitivement changé la donne. Cette plateforme dédiée au streaming de jeux vidéo a permis l’émergence d’une nouvelle génération d’influenceurs capables de jouer en direct devant des milliers, voire des millions de spectateurs. Des personnalités comme Ninja, Gotaga ou ZeratoR sont devenues de véritables phénomènes culturels, captivant quotidiennement des audiences fidèles.

Cette évolution a profondément modifié la stratégie des éditeurs. Alors qu’auparavant, ils investissaient principalement dans les espaces publicitaires traditionnels (télévision, magazines, affichage), ils consacrent désormais une part croissante de leur budget marketing aux partenariats avec les influenceurs. Ce virage stratégique s’explique par l’efficacité supérieure de ces collaborations en termes d’engagement et de conversion.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon une étude de Nielsen en 2022, 71% des joueurs affirment avoir acheté un jeu après l’avoir vu joué par un influenceur. Cette statistique illustre parfaitement le poids considérable qu’ont acquis ces créateurs de contenu dans le processus décisionnel des consommateurs de jeux vidéo, surpassant désormais l’influence des médias traditionnels et même celle de la publicité directe.

Les différents profils d’influenceurs dans l’écosystème du jeu vidéo

L’univers des influenceurs gaming est loin d’être homogène. Il se compose d’une mosaïque de profils aux spécialités, formats et audiences variés. Comprendre cette diversité est fondamental pour les marques qui souhaitent élaborer des stratégies promotionnelles efficaces et ciblées.

Les streamers constituent la catégorie la plus visible de l’écosystème. Ces créateurs diffusent en direct leurs sessions de jeu sur des plateformes comme Twitch ou YouTube Gaming. Leur force réside dans l’interaction instantanée avec leur communauté et dans l’authenticité de leurs réactions. Des figures comme Ibai Llanos en Espagne ou Sardoche en France peuvent rassembler plusieurs dizaines de milliers de spectateurs simultanément lors de leurs diffusions. La puissance d’un stream réside dans sa capacité à montrer le jeu en conditions réelles, avec les émotions brutes du joueur, créant ainsi un effet de mimétisme chez les spectateurs.

À côté des streamers, on trouve les YouTubers gaming, qui produisent du contenu plus travaillé et monté. Leurs vidéos peuvent prendre diverses formes : tests approfondis, compilations de moments forts, guides stratégiques ou formats humoristiques autour des jeux. Des chaînes comme celle de JDG (Joueur du Grenier) ou MrTLexify proposent des contenus hautement scénarisés qui attirent des millions de vues. Ces créateurs privilégient la qualité à la spontanéité, avec un travail important de post-production.

Spécialisation et niches

Une tendance marquante est la spécialisation croissante des influenceurs. Certains se concentrent exclusivement sur un genre particulier (FPS, MOBA, jeux de stratégie) ou même sur un seul jeu. Des créateurs comme Faker pour League of Legends ou TheGrefg pour Fortnite sont devenus des références absolues dans leur domaine de prédilection. Cette spécialisation leur permet de développer une expertise reconnue et d’attirer une audience particulièrement engagée et passionnée.

D’autres influenceurs se distinguent par leur approche analytique. Ces experts du gaming, à l’image de Jason Schreier ou YongYea, proposent des analyses approfondies des tendances de l’industrie, des décryptages de stratégies commerciales ou des investigations sur les conditions de développement. Leur influence s’exerce moins sur les ventes immédiates que sur la réputation à long terme des studios et des éditeurs.

Une catégorie en pleine expansion est celle des influenceurs esport. Anciens joueurs professionnels reconvertis en commentateurs ou streamers, comme Shroud ou Domingo, ils bénéficient d’une crédibilité particulière auprès des communautés compétitives. Leur maîtrise technique et leur connaissance approfondie des mécaniques de jeu en font des prescripteurs particulièrement influents pour les titres à dimension compétitive.

  • Streamers : interaction en direct, réactions authentiques
  • YouTubers : contenu élaboré, formats variés
  • Spécialistes de niche : expertise sur un jeu/genre spécifique
  • Analystes : décryptage de l’industrie
  • Influenceurs esport : légitimité compétitive

Cette diversité permet aux marques de cibler précisément leurs actions promotionnelles en fonction des objectifs recherchés : visibilité massive, crédibilité technique, engagement communautaire ou positionnement compétitif.

Stratégies et mécanismes de collaboration entre éditeurs et influenceurs

La collaboration entre les éditeurs de jeux et les influenceurs s’articule autour de plusieurs modèles d’engagement, chacun répondant à des objectifs marketing spécifiques. Ces partenariats, loin d’être improvisés, font désormais l’objet de stratégies sophistiquées intégrées aux plans de lancement des jeux.

Le format le plus classique reste le placement de produit ou contenu sponsorisé. L’éditeur rémunère directement l’influenceur pour qu’il présente le jeu sur ses plateformes. Ces collaborations peuvent prendre diverses formes : sessions de découverte, tests complets ou intégration du jeu dans des formats récurrents de l’influenceur. La rémunération varie considérablement selon la notoriété du créateur, allant de quelques centaines d’euros pour des micro-influenceurs à plusieurs dizaines de milliers pour les plus grandes stars du secteur. Activision, par exemple, aurait déboursé près d’un million de dollars pour que Ninja joue à Call of Duty: Black Ops 4 lors de son lancement.

Une approche plus subtile consiste à organiser des événements exclusifs pour les créateurs de contenu. Les studios invitent des influenceurs sélectionnés à découvrir leurs jeux en avant-première lors de sessions privées. Ubisoft applique régulièrement cette stratégie, comme pour le lancement d’Assassin’s Creed Valhalla, où des dizaines de créateurs ont été conviés à des sessions de jeu anticipées, générant une vague de contenu coordonnée juste avant la sortie officielle. L’avantage de cette approche est double : elle flatte l’ego des influenceurs tout en garantissant une couverture médiatique massive à moindre coût.

Programmes d’affiliation et ambassadeurs

Les programmes d’affiliation représentent un modèle économique particulièrement efficace. L’influenceur reçoit une commission sur chaque vente réalisée via un lien ou un code promo personnalisé. Ce système, privilégié par des plateformes comme Epic Games Store ou G2A, présente l’avantage de lier directement la rémunération à la performance commerciale. Il encourage les créateurs à promouvoir activement les jeux auprès de leur communauté tout en permettant aux éditeurs de mesurer précisément le retour sur investissement.

Pour les relations à plus long terme, le statut d’ambassadeur officiel d’une marque ou d’une franchise constitue un partenariat privilégié. Des joueurs comme DrLupo pour Bungie (Destiny) ou Aypierre pour Minecraft en France développent une association durable avec un jeu ou un éditeur. Ce type de collaboration implique généralement des obligations contractuelles plus étendues mais offre une visibilité continue et une crédibilité renforcée.

L’accès aux versions alpha et bêta constitue également un levier stratégique majeur. En donnant aux influenceurs un accès privilégié aux versions préliminaires, les éditeurs génèrent à la fois de l’excitation chez les joueurs et recueillent des retours précieux pour améliorer le produit final. Cette pratique s’est généralisée, comme l’illustre le lancement de Valorant par Riot Games, qui a distribué des accès à la bêta fermée via des drops Twitch, créant une demande artificielle massive et transformant les streamers en véritables gardiens de l’accès au jeu.

Les éditeurs affinent constamment leurs approches en fonction des différentes phases du cycle de vie d’un jeu. En phase de pré-lancement, ils privilégient les influenceurs à forte audience pour maximiser la notoriété. Après la sortie, ils ciblent davantage les créateurs spécialisés pour maintenir l’engagement communautaire. Lors des mises à jour majeures, ils réactivent les partenariats avec les grands noms pour raviver l’intérêt. Cette orchestration temporelle témoigne de la maturité atteinte par ces stratégies marketing.

Mesure d’impact et retour sur investissement des campagnes d’influence

L’efficacité des campagnes d’influence dans le secteur du jeu vidéo fait l’objet d’analyses de plus en plus sophistiquées. Les éditeurs et studios ont développé des méthodologies précises pour quantifier l’impact de leurs investissements et optimiser leurs futures stratégies.

Les métriques d’exposition constituent le premier niveau d’évaluation. Le nombre de vues, la portée potentielle et le temps de visionnage permettent d’estimer la visibilité brute générée par une campagne. Pour un jeu comme Elden Ring, FromSoftware a pu constater que les streams de découverte avaient cumulé plus de 700 millions d’heures de visionnage dans les deux semaines suivant le lancement. Cette exposition massive a contribué à propulser le titre au-delà des 12 millions d’exemplaires vendus en un mois, un succès commercial dépassant largement les prévisions initiales.

Au-delà de la simple exposition, les taux d’engagement offrent une vision plus qualitative de l’impact. Les commentaires, partages, likes et temps de visionnage moyen révèlent l’intérêt réel suscité par le contenu. Une étude menée par Stream Hatchet a démontré que les streams sponsorisés de jeux vidéo génèrent en moyenne 25% d’engagement supplémentaire par rapport aux publicités traditionnelles, illustrant la supériorité de ce format en termes d’implication émotionnelle des spectateurs.

Traçage des conversions et attribution

L’attribution directe des ventes représente l’indicateur le plus tangible du succès d’une campagne. Les codes promotionnels personnalisés et les liens de tracking permettent de suivre précisément les conversions générées par chaque influenceur. Electronic Arts a ainsi pu déterminer que lors du lancement d’Apex Legends, près de 30% des nouveaux joueurs provenaient directement de liens partagés par des streamers partenaires, démontrant l’efficacité commerciale immédiate de cette stratégie.

Les études de notoriété avant/après campagne permettent de mesurer l’impact sur la perception du jeu. Des sondages réalisés auprès des communautés de joueurs révèlent l’évolution de la connaissance du titre et de l’intention d’achat. Square Enix a utilisé cette approche pour Final Fantasy XVI, constatant une augmentation de 45% de la notoriété assistée après une vague de contenus créés par des influenceurs japonais et occidentaux.

Le sentiment d’analyse représente une dimension qualitative fondamentale. Les outils d’intelligence artificielle permettent désormais d’analyser automatiquement les commentaires et réactions pour déterminer la tonalité générale des retours. CD Projekt Red a utilisé ces technologies pour suivre la perception de Cyberpunk 2077 à travers les contenus d’influenceurs, identifiant précisément les points forts mis en avant et les critiques récurrentes.

La comparaison avec d’autres canaux marketing offre une perspective précieuse sur l’efficience des investissements. Selon une étude de SuperData Research, le coût par acquisition client via les influenceurs serait inférieur de 30 à 40% à celui des campagnes publicitaires traditionnelles pour les jeux vidéo à gros budget. Ce différentiel explique la réallocation progressive des budgets marketing vers ce canal.

  • Exposition brute : vues, portée, temps de visionnage
  • Engagement : interactions, partages, commentaires
  • Conversion directe : codes promo, liens trackés
  • Études de notoriété : évolution de la perception
  • Analyse de sentiment : tonalité des retours

Ces métriques permettent aux éditeurs d’affiner continuellement leurs stratégies d’influence et d’optimiser le retour sur investissement de leurs campagnes. La sophistication croissante de ces analyses témoigne de la maturité atteinte par le marketing d’influence dans l’industrie du jeu vidéo.

Enjeux éthiques et défis du marketing d’influence dans le jeu vidéo

Le marketing d’influence dans l’industrie vidéoludique soulève des questions éthiques significatives qui affectent l’ensemble de l’écosystème. La frontière parfois floue entre contenu authentique et promotion commerciale place les créateurs, les éditeurs et les plateformes face à des responsabilités croissantes.

La transparence constitue l’enjeu primordial de ces collaborations. Les régulations comme le FTC Endorsement Guidelines aux États-Unis ou les directives de l’ARPP en France imposent désormais une divulgation claire des partenariats rémunérés. Pourtant, une étude de l’Université de Bordeaux révélait en 2021 que près de 40% des contenus sponsorisés liés aux jeux vidéo sur YouTube ne mentionnaient pas explicitement leur nature commerciale. Cette opacité nuit à la fois aux créateurs, dont la crédibilité peut être remise en question, et aux consommateurs, privés d’informations essentielles pour contextualiser les recommandations.

Le phénomène de survalorisation des jeux par les influenceurs représente une dérive fréquente. La pression économique et la volonté de maintenir de bonnes relations avec les éditeurs peuvent conduire certains créateurs à minimiser les défauts des titres qu’ils présentent. L’affaire Cyberpunk 2077 illustre parfaitement cette problématique : de nombreux influenceurs ayant vanté les qualités du jeu avant sa sortie ont dû faire face à la colère de leur communauté lorsque les problèmes techniques majeurs du titre sont apparus au grand jour.

Protection des publics vulnérables

La question de la protection des mineurs se pose avec une acuité particulière. Une proportion significative des audiences d’influenceurs gaming est constituée d’enfants et d’adolescents, particulièrement réceptifs aux recommandations de leurs créateurs favoris. La promotion de jeux comportant des mécaniques de monétisation agressives comme les loot boxes soulève des préoccupations légitimes. Des titres comme FIFA Ultimate Team ou Genshin Impact, promus par de nombreux influenceurs, ont été critiqués pour leurs systèmes s’apparentant à des jeux de hasard.

La pression psychologique subie par les créateurs de contenu constitue une dimension souvent négligée du débat. Pris entre les attentes des éditeurs qui les financent, celles de leurs communautés qui exigent authenticité et honnêteté, et leurs propres impératifs économiques, les influenceurs font face à des tensions constantes. Plusieurs créateurs comme Félix Lengyel (xQc) ou Valentin Deville (Alphacast) ont publiquement évoqué le stress lié à ces contradictions, certains allant jusqu’à refuser des contrats lucratifs pour préserver leur intégrité éditoriale.

Les clauses contractuelles restrictives imposées par certains éditeurs soulèvent également des questions éthiques. Des documents internes de Warner Bros révélés en 2020 montraient que les influenceurs promouvant Shadow of War devaient s’abstenir de mentionner certains aspects controversés du jeu, notamment son système de microtransactions. Ces restrictions à la liberté d’expression des créateurs compromettent l’authenticité qui fait pourtant leur valeur ajoutée.

Face à ces défis, des initiatives d’autorégulation émergent au sein de l’écosystème. Des collectifs comme Creator Code ou la StreamerSquare développent des chartes éthiques pour encadrer les pratiques promotionnelles. Parallèlement, des plateformes comme Twitch ont renforcé leurs exigences en matière d’identification des contenus sponsorisés, avec l’introduction d’outils dédiés permettant de signaler clairement la nature commerciale d’un stream.

L’évolution des mentalités chez les joueurs eux-mêmes constitue un facteur de régulation non négligeable. Les communautés manifestent une vigilance accrue face aux recommandations perçues comme insincères. Cette pression sociale pousse les créateurs vers davantage de transparence et d’honnêteté, comme l’a démontré la vague de mea culpa d’influenceurs après les controverses entourant Fallout 76 ou Anthem.

Perspectives d’avenir : évolution du rôle des influenceurs dans l’industrie du jeu

Le paysage du marketing d’influence dans le secteur du jeu vidéo connaît des transformations rapides qui dessinent les contours de son futur. Plusieurs tendances émergentes laissent entrevoir comment les relations entre influenceurs, éditeurs et communautés pourraient évoluer dans les années à venir.

L’intégration directe des créateurs dans le processus de développement représente une tendance majeure. Au-delà de simples partenariats promotionnels, les studios impliquent désormais des influenceurs dès les phases de conception. Riot Games a fait figure de pionnier en consultant régulièrement des streamers populaires pour le développement de Valorant, tandis que Digital Extremes (Warframe) organise des conseils de créateurs de contenu pour orienter l’évolution du jeu. Cette collaboration précoce permet d’intégrer la sensibilité communautaire directement dans l’ADN des productions, tout en garantissant un soutien authentique des influenceurs lors du lancement.

La fragmentation des audiences et la montée des micro-influenceurs modifient profondément les stratégies d’engagement. Plutôt que de miser exclusivement sur quelques méga-stars aux audiences généralistes, les éditeurs diversifient leurs partenariats vers des créateurs plus modestes mais disposant de communautés hautement spécialisées et engagées. Focus Entertainment a appliqué cette approche pour A Plague Tale: Requiem, collaborant avec des dizaines de créateurs de taille moyenne spécialisés dans les jeux narratifs, obtenant ainsi un taux d’engagement supérieur à moindre coût.

Technologies émergentes et nouveaux formats

L’émergence de technologies immersives comme la réalité virtuelle et augmentée ouvre de nouvelles perspectives pour les collaborations. Des plateformes comme VRChat ou Horizon Worlds permettent d’envisager des événements promotionnels où influenceurs et fans se rencontrent dans des espaces virtuels dédiés. Epic Games a expérimenté ce concept avec les concerts virtuels de Travis Scott et Ariana Grande dans Fortnite, attirant des millions de participants simultanés.

Le développement de modèles économiques alternatifs transforme la nature même des partenariats. Le système traditionnel de paiement forfaitaire évolue vers des modèles plus sophistiqués incluant des participations aux revenus, des royalties sur les ventes générées ou même des investissements en capital. 100 Thieves, organisation fondée par l’influenceur Nadeshot, a ainsi conclu un partenariat stratégique avec Cash App qui va bien au-delà du simple placement de produit, intégrant une dimension d’investissement à long terme.

L’internationalisation des stratégies d’influence constitue un axe de développement prioritaire pour les grands éditeurs. La montée en puissance des marchés asiatiques et sud-américains pousse les studios occidentaux à collaborer avec des influenceurs locaux pour adapter leur communication aux spécificités culturelles régionales. Tencent a ainsi orchestré le lancement de PUBG Mobile en Amérique latine en s’appuyant exclusivement sur des créateurs brésiliens, mexicains et argentins, plutôt que d’importer sa stratégie promotionnelle asiatique.

La professionnalisation de l’écosystème se manifeste par l’émergence d’agences spécialisées et d’outils dédiés au marketing d’influence dans le gaming. Des structures comme Loaded ou Upfluence Gaming se positionnent comme intermédiaires entre créateurs et marques, apportant expertise et standardisation dans un secteur autrefois artisanal. Cette structuration favorise l’établissement de pratiques plus transparentes et de tarifs plus homogènes, contribuant à la maturité du marché.

  • Intégration des créateurs dans le développement
  • Montée des micro-influenceurs spécialisés
  • Exploitation des technologies immersives
  • Diversification des modèles économiques
  • Stratégies régionales adaptées

Ces évolutions dessinent un avenir où l’influence dans le jeu vidéo deviendra un écosystème plus mature, plus diversifié et plus intégré aux différentes phases du cycle de vie des jeux. La frontière entre créateurs, communautés et développeurs continuera de s’estomper, créant un environnement où la co-création et l’authenticité seront les principales valeurs.

L’avenir du marketing vidéoludique : vers une symbiose créative

L’évolution du rôle des influenceurs dans la promotion des jeux vidéo marque un tournant décisif pour l’industrie tout entière. Ce qui a débuté comme une simple alternative aux canaux publicitaires traditionnels s’est transformé en un écosystème complexe qui redéfinit les relations entre créateurs, éditeurs et joueurs.

La valeur fondamentale des influenceurs réside dans leur capacité unique à créer des ponts authentiques entre les produits et les communautés. Contrairement aux campagnes marketing conventionnelles, perçues comme unilatérales et impersonnelles, le contenu créé par les influenceurs génère un dialogue vivant autour des jeux. Cette dimension conversationnelle transforme la promotion en une expérience partagée qui enrichit l’appréciation collective des œuvres vidéoludiques.

Nous assistons à l’émergence d’un modèle où les frontières entre création, promotion et consommation deviennent de plus en plus poreuses. Les influenceurs ne sont plus de simples relais promotionnels mais des co-créateurs qui participent à l’élaboration de l’expérience vidéoludique. Cette nouvelle dynamique se manifeste par l’intégration de suggestions communautaires dans les mises à jour, l’organisation d’événements in-game impliquant des créateurs de contenu, ou encore la conception de fonctionnalités spécifiquement destinées au streaming.

Vers une nouvelle économie créative

La mutation du paysage médiatique vidéoludique engendre une redistribution du pouvoir économique au sein de l’industrie. Les budgets marketing, autrefois concentrés sur les médias traditionnels et la publicité directe, se réorientent massivement vers les créateurs indépendants. Cette décentralisation favorise l’émergence d’un écosystème plus diversifié où de petits studios peuvent atteindre une visibilité significative grâce à des partenariats stratégiques avec des influenceurs ciblés.

Le succès phénoménal de jeux indépendants comme Among Us ou Valheim, propulsés par l’intérêt spontané de streamers influents, illustre parfaitement cette nouvelle réalité. Sans investissement publicitaire massif, ces titres ont conquis des millions de joueurs grâce à l’effet d’entraînement généré par leur visibilité sur les plateformes de streaming. Ce modèle de croissance organique, amplifié par l’enthousiasme authentique des créateurs de contenu, représente une alternative viable au marketing traditionnel à grand renfort de budgets.

L’avenir verra probablement l’émergence de modèles hybrides où les distinctions entre développeurs, influenceurs et joueurs s’estomperont davantage. Des plateformes comme Roblox ou Dreams préfigurent déjà cette évolution, en permettant aux créateurs de contenu de développer leurs propres expériences de jeu. Cette convergence des rôles annonce une ère où la promotion d’un jeu ne sera plus une étape distincte mais une dimension intégrée à son existence même, portée par une communauté active de créateurs-prescripteurs.

La démocratisation des outils de création accentuera cette tendance, en permettant à davantage d’influenceurs de participer directement au processus de développement. Des studios comme Media Molecule explorent activement cette voie, en concevant des plateformes où la frontière entre jouer, créer et partager s’efface progressivement. Dans ce nouveau paradigme, l’influence ne se limitera plus à la recommandation mais s’étendra à la co-création active des univers vidéoludiques.

Cette symbiose créative entre tous les acteurs de l’écosystème vidéoludique pourrait bien constituer la forme la plus aboutie du marketing d’influence. Au-delà des considérations commerciales immédiates, elle favorise l’émergence d’une culture participative où chaque partie prenante – développeurs, créateurs de contenu et joueurs – contribue à enrichir l’expérience collective du jeu vidéo.

Cette vision de l’avenir, fondée sur la collaboration plutôt que sur la simple transaction promotionnelle, porte en elle la promesse d’une industrie plus créative, plus inclusive et ultimement plus fidèle à l’essence interactive qui définit le médium vidéoludique depuis ses origines.